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Emulation semaine 5 : abeilles

 
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ath
Ecrivain amateur


Inscrit le: 29 Mai 2007
Messages: 20

MessagePosté le: Lun Fév 04, 2008 8:54 pm    Sujet du message: Emulation semaine 5 : abeilles Répondre en citant

  Date de début : 04/02/2008
  Date de fin : 10/02/2008
  Thème : abeilles
  Taille min : 1 page A4
  Taille max : 2 pages A4
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ath
Ecrivain amateur


Inscrit le: 29 Mai 2007
Messages: 20

MessagePosté le: Lun Fév 04, 2008 8:55 pm    Sujet du message: Abeilles Répondre en citant

  Je suis enceinte, et je n'ai pas eu de relations sexuelles depuis 5 mois et 2 semaines. Il y a de quoi paniquer.
  Je sais juste que je rêve d'abeilles depuis un mois, sans que je puisse arrêter ça. La nuit, les siestes et même quand je m'assoupis dans le métro, ma tête bourdonne des ses insectes.
  J'ai eu beau me saouler, prendre des hypnotiques, consulter mon médecin, rien n'y a fait, j'ai rêvé d'abeilles pendant un mois jusqu'au jour où j'ai été enceinte.
  
  Les livres d'interprétation des rêves disent que c'est un symbole de fécondité. Cela ne m'avance pas beaucoup de le savoir. Visiblement c'est un symbole super puissant pour arriver à faire de moi une mère sans sexe ni FIV. Je crois que je vais tourner folle, j'ai beau repasser les données dans ma tête, je n'y comprends rien.
  
  Le test pourrait être faux mais j'ai des hauts le coeur et des douleurs dans les seins qui ne mentent pas. Et je sais intuitivement que l'enfant grandit en moi et pompe mon énergie pour démultiplier ses cellules. Le plus ironique dans cette histoire c'est que j'en ai terriblement envie de ce petit, j'en ai envie depuis des années.
  
  J'ai passé trop de temps à chercher un compagnon de vie pour réaliser que je perdais l'opportunité de devenir mère au fur et à mesure. Qui a dit qu'il fallait à une femme autre chose qu'une semence pour créer une famille? Sûrement un homme et je l'ai cru trop longtemps.
  
  J'en étais au point de vouloir adopter ou de chercher un coup d'un soir qui saurait me présenter des résultats négatifs à toute maladie sexuellement transmissible datant du jour. Pas facile dans un bar d'obtenir cette assurance tout risque sans passer pour une malade mentale.
  A la limite il me restait Jonathan, je pourrais lui demander un petit don, sa femme étant un peu jalouse je me doutais de sa réponse mais il avait les gênes qu'il fallait pour la chose, juste des sentiments insuffisants pour moi depuis le départ. D'où la présence à ses cotés de sa femme...
  
  Enfin là le doute se pose: Faut-il réellement une semence? Est-ce que ma seule envie viscérale a suffit à créer l'étincelle.
  
  La réceptionniste du centre d'imagerie doit croire que je suis affligée par mon état vu la manière dont je suis repliée sur moi, la tête entre les mains. Bientôt je ne pourrais plus le faire, mon ventre sera trop rond, trop plein.
  
  Enfin on m'appelle.
  -Mademoiselle Prym, veuillez vous installer sur cette table et défaire votre pantalon.
  
  Je m'exécute rapidement, et j'ai le coeur qui palpite. L'échographiste semble lire la lettre de ma gynéco, voilà bien ma chance. Et une personne de plus sur terre qui me prend pour une mythomane, enfin au point où j'en suis.
  Elle me regarde enfin.
  -Je vais vous mettre un gel pour faciliter l'examen, ça va être un peu froid.
  
  Je ne dis rien, je la laisse faire, passer et repasser sur mon ventre, l'air concentré. L'écran est tourné vers moi mais pour ce que j'y comprends. Je ne vois pas grand chose, une forme vaguement concentrique, une épaisseur sur le devant.
  L'examen s'arrête et le médecin en face de moi approche son siège pour se mettre à la hauteur de mon visage.
  - Vous avez des nausées depuis deux semaines et votre test urinaire est positif... Mais vous n'avez eu aucun rapport depuis un bon moment. Vous devez vous douter que ce n'est pas une grossesse.
  
  A vrai dire je prenais cette affirmation comme on prend une brique en pleine tête.
  - Euh, non je ne comprenais pas mais le test est formel alors...
  Que pouvais-je bien rajouter ?
  - C'est une tumeur, mademoiselle Prym, parfois elles déclenchent des nausées et elles fabriquent des hormones qui trompent les tests urinaires, il y a bien quelque chose dans votre utérus mais ce n'est pas un enfant.
  
  Une deuxième brique, un peu plus et on allait découvrir que c'était un cancer, et d'hors et déjà je pouvais faire une croix sur toute grossesse future que ce soit le cas ou non.
  Abasourdie je la suivi pour la facturation et la prise de rendez-vous pour la biopsie, je me retrouvais dans la rue, puis dans un salon de thé devant un chocolat chaud et un fondant.
  Les abeilles, pourtant j'avais rêvé d'abeilles, avais-je tant envie d'être féconde que mon esprit me bernait pour me faire plaisir, est-ce que ma volonté de faire cet enfant était si grande que mon corps avait créé ces cellules pour tenter l'impossible malgré tout.
  Et voilà que je pleure, ma main accrochée à mon ventre. Je veux garder cet enfant, expérience échouée de mon corps, s'il n'est pas cancéreux. La nature fait des choses étranges et au moins elle m'a offert l'illusion merveilleuse d'avoir ce dont je rêvais, s'il faut en mourir et bien j'aurais un regret en moins.
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Milo
Apprenti écrivain


Inscrit le: 16 Mai 2007
Messages: 9

MessagePosté le: Jeu Fév 07, 2008 10:38 am    Sujet du message: Répondre en citant

  Wellington, jeudi 7 février, 7h du matin.
  
  Le réveil sonne pour la énième fois et cette fois-ci, il faut absolument que je me lève même si je n'en ai pas la moindre envie. Je lance le café et je vais directement prendre une douche.
  
  A peine arrivé dans la cuisine, les toasts sont prêts et l'odeur du café titille mes narines. J'attrape le miel et l'étend doucement sur ces tranches de pain grillées. Plusieurs secondes s'écoulent dans le silence le plus complet, puis je commence à rire malgré moi. Quelle coïncidence que mon premier geste du matin corresponde exactement à ce que je fais pendant la journée!
  
  "Oui Monsieur, le rapport est fini et encore une fois l'opposition n'est pas à même d'y apporter une critique constructive grâce à votre travail acharné."
  
  "Oui Monsieur, c'est grâce à votre dure labeur que toute la "Ruche" fonctionne."
  
  Je me revois à cet instant même, portant une pile de dossiers, refermer la porte en bois ciré du bureau de mon supérieur hiérarchique et celui de bien d'autres, puis me rendre à mon propre placard à balais. La pile de dossiers que je porte vient s'entasser sur une autre qui ne diminue jamais.
  
  Pas le temps de faire la vaisselle. A quoi bon? Je n'ai pas été programmé à faire cela. Moi, fonctionnaire de classe B, rang 24, je suis formaté pour lire, résumer, aller à l'essentielle et ne jamais poser de questions. Pourquoi casser ainsi la chaîne en faisant quelque chose que l'on n'attend pas de moi?
  
  "Oui Moniseur, je comprends. Je fais de suite la correction. C'est vraiment une erreur impardonable de ma part d'avoir cru que vous penseriez cela."
  
  Au bout du fil, on a raccroché. Je me remets au travail et fait ce que l'on attend de moi: endosser la responsabilité si quelque chose va mal et transmettre le message à mon subalterne, fonctionnaire de classe C, rang 18.
  
  Enfin dans le bus. Plus de place. Armée de bottes cirées qui se cognent contre des chaussures en cuir. Voila ce dont je me souviens de ce trajet qui dure une demi heure pour arrivé jusqu'au Beehive. Pas le temps de relever mon regard du sol. A quoi cela me servirait-il de faire connaissance avec ces gens? Croiser le regard de quelqu'un me porterait préjudice. Sûrement. J'ai travaillé trop dur pour en arrivé là et me voir relégué au statut de fonctionaire D, rang 6. Mais pourtant...je relève la tête.
  
  "Monsieur X. Vous souvenez-vous de ce que l'on a discuté lors de votre entretien? Si ce n'est pas le cas, permettez-moi de vous rafraîchir la mémoire. Travailler au Beehive demande abnégation et sacrifice de soi. Lorsque vous l'aurez suffisamment prouvé, vous pourrez occuper la place de la Reine...mais jusqu'à ce moment-là, de longues années vont s'écouler où vous allez vous comporter en bonne petite abeille travailleuse. Est-ce bien entendu?"
  
  "Monsieur?"
  
  Le bras toujours agrippé à la barre en fer, la voix de la personne de qui j'ai failli croiser le regard m'interpelle.
  
  "Monsieur?"
  
  "Si vous ne vous déplacez pas, je vais rater mon arrêt."
  
  Je m'écarte pour lui laisser la place. Je regarde par la fenêtre. La Ruche se dresse devant moi, fière et imposante alors qu'une multitude de véhicules déversent leur contenu pour venir remplir l'édifice.
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brendigoo
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Inscrit le: 06 Mai 2007
Messages: 55

MessagePosté le: Ven Fév 15, 2008 12:00 am    Sujet du message: Qui s'y frotte... Répondre en citant

  « Les insectes sont nos amis, il faut les aimer aussi. » Cet air stupide me trotte dans la tête alors que j'essaie de coucher sur le papier mes souvenirs d'enfance.
  Mon grand-père, un célèbre entomologiste, ne m'a légué de sa passion qu'une trouille bleue de tout ce qui a plus de quatre pattes. Vous conviendrez avec moi qu'au-delà de quatre membres, la morphologie de n'importe quel individu, aussi plaisant soit-il aux premiers abords, le confine dans la catégorie des êtres pas franchement agréables à regarder. Vous pouvez y mettre le visage de miss France – et encore, je gage que ce ne soit pas la meilleure chose à faire pour avoir l'effet escompté -, voire celui de votre amour d'enfance brisé, un corps avec six ou huit pattes, ou plus encore, reste vilain à observer, pour ne pas dire effrayant.
  
  Dans la famille des insectes volants, je voudrais l'abeille.
  
  Ma première relation sérieuse avec une de ces gentes dames remonte à mes six ans. Vous serez attristés d'apprendre qu'il s'agissait plus d'une chimère fantasmée que d'une véritable aventure. Mais laissez-moi vous en dire plus avant de juger.
  Ma soeur avait invité une de ses amies à la maison. Mes parents sont divorcés, et depuis leur séparation, ma mère éprouve des difficultés à ne pas céder au moindre caprice de sa fille. Comme ma mère se divertissait dehors en compagnie d'un charmant jeune homme trois fois plus âgé qu'elle, j'appréhendais non sans raison la soirée à venir. Seule, ma soeur représentait un danger non négligeable, mais une fois dopée avec la présence de sa comparse machiavélique, autant vous dire que mes chances de survies étaient à peu de choses celles d'un lapin dodu face à deux cerbères tout justes sevrés.
  La soirée n'avait pourtant pas trop mal commencé. J'avais eu le droit de regarder un épisode de Winnie l'Ourson, bercé par la voix grave de Jean Rochefort, et ma mère m'avait couché, un baiser déposé sur mon front, avant de s'en aller. C'est à partir de là que les choses se gâtèrent. Le film d'horreur du Samedi soir ne commençait qu'à vingt-trois heures, et d'ici là, il fallait bien occuper les deux harpies qui se tapissaient dans une des pièces de mon appartement. Bien emmitouflé dans mon lit superposé inférieur, j'écoutais les vrombissements des moteurs de la nationale sept, à chaque fois que le feu placé sous ma fenêtre passait au vert. La somnolence me gagnait comme une douce tiédeur, mes paupières se fermaient avec plaisir, rassurées par ces bruits familiers. Soudain l'orage se déchaîna à l'intérieur, avec une violence inouïe.
  - Eric !
  De la porte béante se déversait un flot de lumière agressive sur mes yeux ensommeillés. Inutile de protester, je n'aurais fait qu'attiser sa colère. Sauf, qu'étrangement, ma soeur ne venait pas m'admonester pour des erreurs qui n'étaient pas de mon fait, comme elle en avait l'habitude, mais pire, elle arborait un sourire faussement innocent, qui purulait de perversité.
  - Eric, Eric, j'ai peur.
  - Tu as peur de quoi ? », demandais-je aussi prudent que possible.
  - Dans les toilettes, il y a une grosse abeille.
  Une des tactiques de ma soeur. Bien que de trois ans mon aînée, elle estimait que ma condition d'homme (même si je n'avais que six ans), me valait de ne craindre absolument rien et que je devais la protéger des fléaux de ce monde. Je compris plus tard que tout ceci n'était qu'une ruse destinée à me tourmenter à loisir en m'exposant à des dangers que je n'aurais, en d'autres circonstances, osés braver.
  Je me levai, donc, terrifié à l'idée de pénétrer dans l'antre de ce terrible insecte. Sans compter que les toilettes étaient bouchées et qu'en plus du monstre volant, il me faudrait affronter également les pestilences d'une purée mousseline mal digérée. Le niveau de l'eau saumâtre redescendait un peu au cours du temps et permettait donc d'utiliser tout de même les toilettes, nonobstant les quelques désagréments olfactifs.
  Je ne trouvai évidemment nul trace de l'intrus à six pattes. En revanche, je n'osai plus me rendre aux toilettes du reste de la nuit et des suivantes, si bien que je renouai avec une tradition séculaire, que je m'étais pourtant farouchement évertué à faire disparaître, et qui devait rendre mes nuits à la fois plus chaudes et plus fraîches.
  
  Fiez-vous à leur taille de guêpe pour estimer au mieux le venin qu'elles sécrètent. Ma sœur, avec sa gentillesse si mielleuse et ses minauderies obséquieuses, pouvait vous arracher la tête d'un coup de dent et se délecter du nectar du flot jaillissant de vos artères tout en continuant à rire.
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dervenn_coz
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MessagePosté le: Sam Déc 31, 2011 3:18 pm    Sujet du message: Répondre en citant

  Eloën entendit un vrombissement sur sa droite. Au loin, un point noir grossissait lentement. Le bruit se faisait de plus en plus fort. Bientôt, ce fut un tel vacarme qu’il n’entendait plus rien d’autre. Des frelons! Ce qu’il avait pris initialement pour un seul animal était en fait un trio de ces dangereux insectes qui volaient en formation. Il pouvait maintenant les distinguer sans effort: les frelons se déplaçaient à vive allure et, plus exactement, ils lui fonçaient droit dessus. L’estomac d’Eloën se noua. Une rencontre avec un frelon était déjà une épreuve à l’issue incertaine, mais avec trois de ces monstres à sa poursuite, ses chances de survie étaient quasiment nulles. Il se pencha en avant, plaquant son corps contre le thorax de sa monture, la poussant à voler plus vite encore. Mais entre une abeille fatiguée d’avoir porté son cavalier depuis déjà plus d’une heure et des frelons sauvages, les chances étaient inégales. Les frelons gagnaient du terrain. Eloën changea de position, ramenant ses épaules et ses talons vers l’arrière, tendu comme un arc, tandis que son abeille plongeait à la verticale. Elle redressa sa course in extremis, à quelques centimètres à peine du sol, puis se lança dans une série de zigzags à travers les herbes folles. Le groupe de frelons se dispersa. A chaque nouveau crochet, les frelons perdaient un peu de temps, mais ils parvenaient tout de même à les suivre.
  - Bzzzzzz! Bzz bzzzz.
  - Tu... tu es sûre? Vraiment?
  - Bzz.
  L’abeille remonta un peu, juste au-dessus des herbes, puis fonça tout droit, à une vitesse qu’Eloën ne lui avait jamais vue atteindre. N’étant plus gênés par les herbes, les frelons se regroupèrent et leur donnèrent la chasse. Ils se rapprochaient dangereusement. Tout d’un coup, l’abeille se cabra et fila droit vers le ciel. Les frelons, plus lents à changer de direction, se retrouvèrent empêtrés dans la toile d’araignée qu’Eloën et son abeille venaient d’éviter de justesse.
  - Ouf! Nous l’avons échappé belle. Bravo pour tes réflexes.
  - Bzzz! Bzzzz!
  L’abeille avait raison: l’un des frelons avait échappé au piège. Protégé par les corps de ses deux congénères, il n’avait été touché que par quelques fils gluants. Il semblait avoir des difficultés à voler droit, mais la gêne n’était pas suffisante pour l’immobiliser. Eloën et son abeille foncèrent, espérant le semer avant qu’il n’ait retrouvé tous ses moyens. Trop tard! Bourdonnant de plus en plus fort, le frelon se débarrassa de ses dernières entraves et se jeta à la poursuite de l’abeille et de son cavalier. Cette fois, l’attaque ne pouvait pas être évitée.
  Le frelon chargea, passant au-dessus d’Eloën pour frapper l’abeille à la tête. Celle-ci fit un écart, mais l’envergure de l’attaquant était trop large: il déplia simplement ses pattes et les referma en un piège autour de l’abeille. Eloën poussa de toutes ses forces sur la patte avant gauche, espérant desserrer l’étau, mais le frelon était trop puissant. Il ouvrit ses mandibules et essaya d’arracher la tête de l’abeille. Heureusement, celle-ci était en train de se débattre et il ne toucha que son antenne. Eloën devait agir vite avant qu’il ne réussisse à la tuer. Il prit une profonde inspiration pour se donner du courage et commença à escalader le long d’une grosse patte velue. Le frelon faisait des embardées de plus en plus violentes, tentant de le déloger, tandis qu’Eloën s’agrippait, continuant à progresser le long du corps de la bête. Enfin arrivé au dessus du frelon, il plongea son épée tout droit, à la jonction entre le thorax et la tête de l’insecte. Un liquide transparent et visqueux gicla et le frelon cessa brutalement de voler, s’abattant au sol en une vrille effrénée. Eloën fut ejecté. Il n’eut que le temps d’imaginer sa mort, écrasé sur le sol. Il ressentit un choc terrible, comme si on lui arrachait le torse, puis tout devint noir.
  - Bzz bzz?
  - J’ai mal partout... mais, je ne suis pas mort?
  - Bzz. Bzzzzzzz bzzzz bzzz.
  - Eh bien, je te dois une fière chandelle. Ca fait longtemps que je suis inconscient?
  - Bzzz. Bzzzz, bzz bzzz!
  - Quoi? Pourquoi ne m’as-tu pas réveillé plus tôt? Le message! Dépêchons-nous!
  Encore un peu étourdi, Eloën remonta avec difficulté sur le dos de son abeille. Au vu de la douleur qu’il ressentait à chaque respiration, il avait sans doute une côte cassée. Ce n’était qu’un moindre mal, il guérirait vite. Son abeille, par contre, resterait handicapée à vie, avec son antenne arrachée. Inutile de s’apitoyer sur leur sort, ils trouveraient bien le temps de se faire soigner demain. Pour le moment, ils avaient une mission à remplir. Pourvu qu’ils arrivent avant la tombée de la nuit! Messire Kaldig avait été très clair sur l’urgence du message. S’il n’arrivait pas avant ce soir, ce serait comme si il n’avait rien envoyé du tout. Eloën ne pouvait que spéculer sur le contenu du rouleau qu’il portait à la ceinture. Peut-être cela avait-il un rapport avec les rumeurs qui couraient à propos d’une possible invasion de termites? D’après les rangers qui étaient revenus de mission ce matin, les heurts entre les fourmis du sud et les termites semblaient en effet de plus en plus fréquents. Et puis, les cuisiniers se plaignaient de devoir commencer à préparer les réserves pour l’hiver, avec au moins deux semaines d’avance sur le calendrier des années précédentes...
  En raison de son statut de simple coursier, Eloën n’était jamais informé de la teneur des messages qu’il devait transporter. Et il se gardait bien de placer sa curiosité là où elle pourrait être considérée comme une faute grave. Par miracle, le sceau n’avait pas été brisé dans la bataille. Par contre...
  - Mon épée! J’ai perdu mon épée!
  - Bzz. Bzzzzzzz.
  - Je sais, mais si nous avons de nouveau des ennuis?
  Eloën n’avait pas le choix. Ils n’avaient pas le temps de revenir en arrière. Au moins, il n’avait pas perdu le message. Ils avaient trois heures de retard par rapport à la vitesse de navigation maximale, mais s’ils continuaient à voler à vive allure, ils devraient quand même arriver à temps.
  Le ciel commençait à s’assombrir, mais la ruche était en vue. Dans un dernier sursaut d’énergie, l’abeille fila vers l’entrée de la ruche, gardée par deux sentinelles. Celles-ci reconnurent Eloën et le laissèrent entrer sans encombre. Eloën laissa son abeille épuisée se traîner péniblement vers les rayons de repos tandis qu’il se dirigeait vers la salle d’audience. Il fut arrêté par le chambellan, un être assez peu aimable qui ne voulait pas le laisser passer, prétendant que les audiences étaient closes pour la journée. Cette espèce d’outre à miel s’embarqua dans un long monologue sur le respect des horaires et lui servit toute une théorie fumeuse sur l’influence de la hauteur du soleil et d’une tenue vestimentaire appropriée sur la qualité d’écoute des hauts dignitaires. Eloën crut qu’il allait devenir fou. Personne ne semblait comprendre l’urgence de sa requête. Et si la guerre éclatait pendant qu’on le tenait prisonnier du savoir vivre? Enfin, après s’être longuement expliqué et avoir été fouillé deux fois, il obtint le laisser passer.
  La salle d’audience était grande et sombre, avec pour seule source de lumière les cierges qui entouraient le trône. Leur lueur mettait parfaitement en valeur le teint bouton d’or de la reine. Dame Gentiane était assise, le buste droit, la tête haute. Son regard d’un bleu profond enveloppait l’ensemble de la salle, daignant, par brefs instants, se concentrer sur le visage de la personne qui lui adressait la parole. Il s’agissait pour le moment de l’ambassadeur de la Fourmilère du Sud, qui présentait à Dame Gentiane une énorme malle, contenant une magnifique pièce de tissu en fil d’araignée domestique. La toile, fine et brillante, d’une couleur moirée oscillant entre le bleu clair et l’argent, était splendide. Mais l’ambassadeur n’en finissait pas de vanter les mérites de la nouvelle guilde des tisseurs et Eloën était à bout de patience. Lorsque le flot de paroles se tarit, Dame Gentiane fit un mince sourire, remercia l’ambassadeur et le congédia poliment, tandis que deux serviteurs portaient la malle pour la déposer sur la table, à gauche de la salle. Le maître de cérémonie, debout à côté du trône, fit signe à Eloën qu’il pouvait s’avancer. Il soupira de soulagement et s’avança aussi près de la Dame que le lui permettait l’étiquette. Il s’agenouilla de façon fort peu gracieuse en raison de sa côte douloureuse, mais parvint à maintenir une position convenable tout en tendant le rouleau devant lui. Un serviteur s’en empara et Eloën osa lever les yeux pour vérifier qu’il le remettait bien à Dame Gentiane. Celle-ci brisa le sceau et parcourut rapidement le message des yeux. Elle rendit le papier au serviteur, qui le déposa sur la table.
  - Vous transmettrez mes remerciements à Messire Kaldig. Bonsoir.
  Heureux d’avoir accompli sa mission, Eloën quitta la salle. Il se lèverait demain à la première heure et se renseignerait auprès du chambellan pour savoir s’il devait attendre une réponse écrite, ou s’il rapporterait simplement les mots de Dame Gentiane à son maître. Il faudrait aussi qu’il déniche un soigneur. D’ici là, il ferait mieux de profiter de la courte nuit de repos qui l’attendait aux côtés de son abeille.
  Derrière lui, les portes de la salle d’audience se refermèrent. Dame Gentiane et sa suite regagnèrent leurs appartements, sans un regard vers la table couverte de richesses. Entre un coffret de bois finement gravé et un collier de perles, une âme curieuse aurait pu lire le mot, griffonné à la va-vite: “Ma très chère cousine, je vous souhaite un excellent anniversaire”.
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