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Emulation semaine 1 : fuseau

 
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Dee
Ecrivain


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MessagePosté le: Dim Jan 13, 2008 10:18 am    Sujet du message: Emulation semaine 1 : fuseau Répondre en citant

  Gloire à Ath et Rico qui ont trouvé le moyen de nous remettre au boulot d'écriture après moults tentatives.
  L'idée c'est que chaque semaine on doit pondre une nouvelle de minimum 1 page, maximum 2 en partant d'un thème imposé.
  
  Cette semaine le thème est : fuseau.
  
  Date limite : 14/01/08
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Dee
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Inscrit le: 10 Mai 2007
Messages: 40

MessagePosté le: Dim Jan 13, 2008 10:23 am    Sujet du message: Répondre en citant

  Le conseiller financier au visage rondouillard le rendait nerveux à le fixer comme un élève à l’amende.
  « Nous ne faisons pas de miracles, Monsieur Dréon. Vos revenus sont insuffisants pour couvrir le prêt que vous sollicitez. J’ai réévalué les mensualités. La loi nous interdit de contracter un prêt dont les échéances de recouvrement seraient supérieures à 45% des revenus du demandeur.
  - Ecoutez il me faut cet argent. Je n’ai pas le choix. Mon ex-femme quitte la planète et elle emmène mon fils avec elle. Vous avez un fils Monsieur Revet ? Le mien a 5 ans. Si je ne trouve pas l’argent pour m’installer sur Mars, c’est le futur mari de ma femme que Gabin appellera papa avant d’avoir 7 ans.
  - Mars ? Vous installer sur Mars ? » Le banquier eut ce sourire cruel de qui est à peine assez bien élevé pour ne pas rire au visage de la sincérité. « Vous n’y pensez pas Monsieur Dréon. Ou plutôt : n’y pensez plus dans l’immédiat. Non, non, non, Mars c’est inabordable. Vous n’aurez rien à moins de trois millions de crédits. Et il faut compter en plus le transport interplanétaire et le coût du déménagement. Même avec un prêt sur quinze ans je vous conseille de vous attirer les promotions.
  - Quinze ans, vous vous foutez de moi ?! Mon fils sera majeur et vacciné d’ici là !
  - Calmez-vous Monsieur Dréon. Ca ne sert vraiment à rien de vous énerver, bien au contraire. »
  Le regard du banquier doucha la colère de Renan. Son interlocuteur avait le pouvoir de refermer son dossier sans regret et il venait de le lui rappeler.
  « Ecoutez je fais toutes les heures supplémentaires que je peux à mon travail. Je travaille tous les jours à l’heure du Fuseau. Je ne vois le soleil que le dimanche. Peut-être que je peux demander une augmentation. Et un partenariat avec une banque martienne ce serait possible non ? Je pensais justement financer un prêt pour les études de mon fils une fois là-bas. Qu’est-ce que vous en dites ? Comme ça je paie sur quinze ou vingt ans mais vous me donnez une partie de la somme maintenant.
  - On ne signe pas de contrat interplanétaire pour un prêt de cet ordre Monsieur Dréon. Tout ce que je peux faire pour vous c’est soumettre un prêt de trois millions de crédits sur quinze ans ou de quatre millions sur vingt ans. Si vous voulez mon avis, pour votre fils, le mieux c’est de prendre un crédit de trois millions sur vingt ans, ça sera moins lourd financièrement et vous pourrez aller le voir de temps en temps. Investissez la somme ici sur Terre et à la limite si le cœur vous en dit vous pourrez toujours acheter sur la Lune quand il ira à l’université. »
  
  Une fois sorti de la banque Renan resta sur le trottoir pendant de longues minutes. Dans la rue sombre des individus entraient et sortaient des restaurants. Lui avait dû sauter le déjeuner. Il se grilla une cigarette, allumée par des mains légèrement tremblantes. Il n’arrêtait pas de penser aux paroles de son conseiller financier et au prix du billet interplanétaire. S’il suivait son conseil il ne verrait son fils que quelques jours par an, entre deux périodes à se morfondre et à se saigner pour payer le billet suivant pour mars. Et quand il verrait enfin Gabin, lui offrirait les jouets dont il avait eu envie l’année passée, celui-ci ne saurait plus quoi dire à son père. Non, il préférait encore devenir mineur sur Phobos, cette triste lune martienne, il y perdrait peut-être sa santé mais il aurait les moyens d’aller voir son fils toutes les semaines. Il en était à se demander s’il allait passer les quinze prochaines années de sa vie à perdre de sa masse osseuse dans les mines à faible gravité de Phobos et à essayer de convaincre Gabin que l’Université Lunaire valait mieux que celle de Tharsis quand son téléphone vibra. C’était Laura, son ex.
  « Gabin n’arrête pas de demander si tu seras là ce soir pour son anniversaire et je ne sais pas quoi lui dire.
  - Et bien tu lui dis que je passerais le voir après le travail. Je fais des heures supps, je passerais vers 20h.
  - Tu sais très bien que je n’aime pas quand tu viens le voir aussi tard » commença-t-elle sur un ton agacé. « Et il s’attend à te voir au goûter d’anniversaire à 17h avec tout le monde.
  - Et tu sais très bien que je bosse à l’heure du Fuseau. A qui la faute hein ? Tu vas pas me reprocher de négliger mon fils alors que c’est toi qui l’embarque sur Mars non ?
  - Ca va remballe ton discours, je le connais par cœur maintenant. Simplement je trouvais que ça pouvait être important pour toi de passer le Fuseau avec ton fils le jour de son anniversaire avant qu’on s’en aille. Maintenant tu fais ce que tu veux. »
  Tonalité. Elle avait coupé. Un quart d’heure avant la fin de la pause déjeuner, il irait reprendre le travail les tripes retournées. Il ne lui restait que l’espoir du rendez-vous de demain avec une banque concurrente. C’était un mince espoir. Peut-être que Laura avait raison. Peut-être qu’au lieu de se battre contre un moulin à vent il ferait mieux de profiter des derniers moments sur Terre avec Gabin. Surtout qu’à 5 ans les symboles étaient importants. On fêtait son anniversaire à 17h – en tout cas sous cette longitude – quand le chenal orbital passait au-dessus de nos têtes, laissant la lumière du soleil descendre jusqu’au sol. Le reste du temps, pendant la nuit artificielle, ça n’était pas vraiment la même chose.
  
  Le chef avait gueulé. Si Renan avait des espoirs d’augmentation pour son assiduité des derniers mois, ses volontariats pour travailler pendant le Fuseau entre deux équipes, ils vacillaient aujourd’hui. Lâcher une heure supplémentaire à la dernière minute ça ne plaisait pas beaucoup.
  Ca lui faisait presque bizarre de quitter à 16h30 comme la plupart des gens, de sortir du travail alors que les ténèbres laissaient place à une lumière diffuse à mesure que l’heure du Fuseau approchait. Avec la foule il se pressa dans le métro, tâchant de protéger le cadeau de Gabin à son corps défendant. Laura avait loué une terrasse pour l’occasion. C’était forcément bien plus chic que l’époque où ils fêtaient l’anniversaire du petit sur la pelouse artificielle du parc voisin. Elle disait avoir les moyens, maintenant qu’elle vivait dans la maison de son nouveau compagnon. Renan, lui, soupçonnait bien que le Alexandre participait à ce nouveau genre très bourgeois.
  Il dut donner son nom au portier de l’hôtel qui parut bien surpris de le trouver sur sa liste. Il faisait bien jour maintenant et son style ouvrier faisait clairement tâche sur le décor raffiné du quartier. Etant donné l’adresse choisie par Laura les invités s’étaient un peu endimanchés, mais Renan remarqua qu’ils avaient tendance à porter sur les lieux un regard un peu trop touristique pour faire naturel. Les enfants, eux, étaient loin de ces considérations. Il ne lui fallut pas longtemps pour repérer le roi de la fête. Celui-ci menait une bande de gamins dans un raid bien organisé sur les buffets artistiquement dressés.
  Gabin riait aux éclats. Il semblait bien pâle sous la lumière naturelle, le teint un peu jaune à cause des compléments alimentaires. Malgré lui, Renan se dit qu’au moins sur Mars le petit garçon n’aurait pas à se contenter d’une heure de soleil par jour. Au moins sur Mars Gabin ne respirerait pas un air recyclé depuis moins de 24h. Le matin il pourrait boire un jus d’orange sans alicaments fait avec de vraies oranges qu’on fait pousser dans les vergers martiens et pas de ces oranges cultivées sous lampes dans des serres hydroponiques comme celle où Renan travaillait. Il pourrait partir en week end à la campagne et se rouler dans l’herbe sans craindre de se cogner dans un dôme. Pendant un instant il imagina un anniversaire futur, un Gabin de 18 ans, grand et athlétique comme tous les adolescents martiens privilégiés, le teint un peu mât comme les mannequins de publicité. Son père ferait encore plus tâche qu’aujourd’hui parmi les invités avec son teint blafard de Terrien. Mais ça valait peut-être le coup de se ressembler moins, de se voir moins si Gabin avait droit à une meilleure santé et une meilleure vie. Renan se sentit soudain plus triste mais moins en colère contre Laura. Elle avait toujours tort d’emmener son fils loin de lui, mais un peu moins. Il lui accordait en tout cas le bénéfice de vouloir un cadre de vie meilleur pour leur petit garçon.
  Gabin, qui l’avait repéré, se jeta dans ses bras.
  « Papa c’est vrai que sur Mars on ronze ? »
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brendigoo
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MessagePosté le: Dim Jan 13, 2008 11:12 pm    Sujet du message: Les frères Powitt Répondre en citant

  Neis avançait sur la pointe des pieds à la lueur de sa lanterne. Les parois de la grotte tremblaient et se paraient des teintes chaudes du sodium incandescent. Genium le suivait comme son ombre. Le sol traître ralentissait leur progression. Depuis qu'ils étaient sous la Montagne, les minutes s'égrenaient comme des heures.
  
  Ils n'avaient même pas dix ans et pourtant, entre leurs mains reposait l'avenir des derniers dragons. Les héros ne manquaient pas à l'appel. Hedel, le fils des marais et des landes, qui avec son arc long pouvait tuer un oiseau à cent pas en pleine nuit. Browick, le bourru, qui connaissait la Montagne comme sa poche pour y avoir vécu plus d'un siècle auparavant, avant que la Conscience et ses sbires ne s'y installent. Domwer, des rivages sauvages, qui possédait le don de double vue. La liste était longue. Ludvor, le démiurge du petit peuple, coordonnait les actions de ces troupes d'élites depuis sa tour de platine, dans les terres australes.
  Cependant, pour la plus périlleuse mission depuis la création de la confrérie, Ludvor ne choisit aucun de ces héros. A la place, il confia le sort des derniers dragons à Neis Powitt, 9ans, et son frère Genium, qui venait tout juste de fêter ses 7 ans.
  - Pourquoi ?! », s'était insurgé Browick, en martelant le plancher du pommeau de sa hache. « Pourquoi, diable, confiez-vous cette mission à ces gosses ? Par la barbe des mes aïeux, vous savez pourtant bien ce qui est en jeu. L'unique chance de faire revivre les dragons va nous échapper par vôtre folie...Sauf votre respect ..., Démiurge » s'était-il senti obligé d'ajouter face au regard de fiel que lui avait lancé le fou en question.
  L'argumentaire que lui rabâchait Ludvor depuis une heure n'avait pas suffit à le convaincre. On était montagnard ou on ne l'était pas. Qu'il aille faire croire à d'autres que la Conscience détectait les « auras avérées ». Encore une expression de magicien sénile pour vous embrouiller les idées. D'après Ludvor, la Conscience ne voyait pas les enfants dénués de la moindre concupiscence. Comme si la créature de la Montagne n'était qu'un pervers qui se repaissait des pulsions sexuelles des intrus.
  Si l'entêtement était l'apanage des montagnards, il n'était sûrement pas suffisant pour faire fléchir Ludvor. Celui que tous surnommaient le Démiurge écouta donc déblatérer Browick jusqu'au coucher du soleil, et deux jours durant encore, mais au final, il ordonna à Domwer de guider les frères Powitt jusqu'à l'entrée secrète de la Montagne.
  - Méfiez-vous des serviteurs de la Conscience, leur avait dit Domwer en guise d'ultime avertissement. Ils peuvent prendre des apparences très variées. Ne vous fiez à quiconque que vous puissiez rencontrer là-dessous.
  Il avait remis à Neis un coutelas, plus pour les rassurer qu'autre chose. Penser que son frère devrait peut-être se servir de cette arme n'avait pas réconforté Genium.
  
  Des boyaux de la Montagne, il en avait par dessus la tête. Les pieds de Genium avaient doublé de volume et son ventre n'arrêtait pas de réclamer à manger. Neis prétendait qu'il fallait économiser la nourriture au cas où le retour s'avèrerait plus long. Genium, lui, aurait volontiers chipé dans la besace de son frère pour y chaparder les délicieux biscuits secs du marin. Domwer les avait confiés à Neis, et Genium trouvait cela profondément injuste. Pour la centième fois, il percuta le derrière de son grand frère.
  - Nous y sommes, annonça Neis.
  Deux gardes coiffés de casques cornus et armés de lourdes hâches se dressaient devant eux, à une dizaines de mètres. Genium ne distinguait que leur contour, mais les lames des haches luisaient dans l'obscurité. Deux sourires en forme de croissant de lune pas franchement accueillants. Neis avait rabattu le cache de sa lanterne conformément aux instructions de Ludvor. La carte scintillait encore du message écrit en lettres de feu par le démiurge.
  - Que ... que faisons-nous, Neils, demanda Genium à son frère. Son bégaiement, qu'il avait perdu un an auparavant, l'avait retrouvé depuis qu'ils erraient dans les entrailles de la Montagne.
  - Tu les contournes et tu les égorges sans faire de bruit.
  - A...a...arrêtes de dire des bêtises. Nous n'avons pas tout...toute la nuit devant nous.
  Genium essayait de se donner une contenance mais son maudit bégaiement gâchait tout. L'un des gardes regardait dans leur direction depuis un temps trop long à son goût. Il le signala à Neils qui se contenta de hausser les épaules.
  - Qu'est-ce que ça peut me faire ? Qu'il vienne et il goûtera au baiser mortel de mon coutelas. Il avait dit cela avec toute l'assurance que lui permettaient ses dix ans.
  - Tu.. tu ne sais même pas t'en servir.
  - Ah ouais ?
  La réplique ne tolérait pas de riposte.
  - Bon, il est temps d'utiliser la babiole du vieux.
  Il posa sa besace sur le sol et en extirpa un long fuseau en noyer.
  - C'est... c'est quoi ce tube ? » interrogea Genium.
  - Un fuseau, ignare. Je me demande bien pourquoi le vieux a voulu que tu m'accompagnes. Pour ce que tu me serres.
  - Je...je suis d'accord avec toi. Si... si j'avais pu refuser...
  - Mouais. Bon, il paraît que ce machin attire les deux bestiaux d'en face comme des mouches. Si j'ai bien compris, le bois du fuseau provient du même arbre que celui du fuseau qu'ils utilisent pour enrouler la soie des oeufs. Il suffit que j'enlève le film de protection qui l'entoure pour qu'ils se précipitent dessus comme des forcenés. Si ça fonctionne vraiment, on n'a pas intérêt à traîner dans le coin. Les oeufs sont dans la salle juste derrière les gardes.
  Neis retira la pellicule qui entourait le fuseau, puis il la jeta de toutes ces forces dans le couloir de droite. Un rebond, puis deux et le fuseau s'immobilisa, hors de leur champ de vision.
  - Ils ...ils...ils s'approchent, bégaya Genium en reculant d'un pas.
  Neis l'agrippa par la manche et lui susurra.
  - C'est pas le moment de flancher, frangin. Dès qu'ils sont engagés dans le couloir, on court tout droit. Et sur la pointe des pieds. Compris ?
  Genium déglutit et opina du chef.
  Une odeur de fauve mêlée à celle plus piquante de soufre se répandait à mesure que les gardes se rapprochaient. Ils auraient paru gigantesques à des hommes de grande taille, alors je vous laisse imaginer ce que pouvaient ressentir deux enfants du petit peuple. Quand il ne furent plus qu'à quelques mètres, Genium et Neis ne pouvaient même pas distinguer leurs têtes, perdues dans l'obscurité du plafond du tunnel. En revanche, les énormes pattes griffues leur apparaissaient très nettement. Neis, dans un accès d'insouciance, songea à leur demander la « papatte », comme il faisait avec les chiens du village, mais le raclement très réel des griffes sur la roche et la puanteur presque suffocante qui s'exhalait des masses en mouvement lui ôtèrent derechef cette idée de la tête. La prise sur le bras de son petit frère s'accentua.
  Quand les deux mastodontes leur eurent tourné le dos, Neis entraîna Genium avec lui. Un seul son trop sonore et s'en était fait. Ne pas faire crisser les cailloux en marchant dessus, ne pas céder à la panique et hurler de terreur. Il en était capable. Ludvor l'avait choisi pour son sang froid. Mais pour ce qui était de son petit frère...
  
  Ils franchirent le pont qui surplombait le précipice et arrivèrent dans la salle de tissage. Un système complexe de rouages faisait tourner un fuseau similaire à celui qu'avait jeté Neis. Il était cependant au moins dix fois plus grand. Deux immenses vérins surgissaient du sol pour actionner les roues, mus par quelque force obscure tapie dans les profondeurs de la Montagne. Le fuseau tournait à une vitesse régulière. Trois fils de soie qui provenaient d'une salle voisine s'y enroulaient.
  - Nous y voici, se félicita Neis.
  - Qu'est-ce qu'on...qu'on fait, maintenant ?
  - Le vieux m'a dit que la chose de la Montagne utilise la soie des oeufs de dragons pour fabriquer des armures à son armée. Il paraît que les bébés dragons en ont besoin pour ne pas avoir froid. Sinon ils meurent. Ils n'en n'ont plus pour très longtemps. C'est là qu'on intervient pour les sauver.
  - Et ils sont gr...gros les oeufs ?
  - On s'en moque. Le magicien m'a donné une fiole qui va accélérer leur développement. Tout ce qu'on a à faire, c'est de les badigeonner avec et de décamper.
  
  Ils trouvèrent effectivement les oeufs en suivant le fil. Trois oeufs de la taille d'un rocher enrubannés dans de la soie filandreuse siégeaient avec solennité au milieu de la caverne. Les frères Powitt s'acquittèrent de leur tâche avec minutie. Ils ne purent ressortir parce que les gardes étaient revenus à leur poste. Ils se terrèrent plusieurs jours. La prudence de Neis en matière de nourriture leur permit de subsister jusqu'à l'éveil des dragons. S'ils avaient bougés Neis et Genium auraient été croqués tout cru, mais ils surent rester immobiles assez longtemps.
  Le premier casse-croûte des dragons fut évidemment les gardes. Les autres sbires de la Conscience ne firent pas long feu face à ces jeunes dragons affamés. Neis et son frère regagnèrent la sortie une fois le chaos des premiers instants passé. Des pièces de monnaies furent gravés à leur effigie. Le bégaiement de Genium cessa au bout de quelques semaines et il put à loisir vanter ses hauts faits à tout les enfants de son village. Neis n'eut aucun mal à découvrir la concupiscence qui, par son absence, lui avait valu son exploit. Les jeunes filles rougissantes ne manquaient pas à son approche, d'autant qu'il se pavanait avec une des armures des défunts gardes, copiée à sa taille par un des tisserands locaux.
  
  Ainsi commença à nouveau le règne des dragons. Avec lui une ère de chaos et d'effroi supplanta la paisible période où le seul mal qui trônait en Amardie était celui d'une conscience tapie dans une montagne que la plupart des personnes ne connaissaient pas. Il fallut faire avec les rapines de vaches, les incendies fulgurants, et les autres peccadilles qui sont l'apanage des créatures facétieuses que sont les dragons. Mille an plus tard, on honnissait encore les frères Powitt. Nombre de jurons commençaient par : « Par la bêtise des frères Powitt... ».


Dernière édition par brendigoo le Ven Mai 30, 2008 6:55 am; édité 2 fois
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ath
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MessagePosté le: Jeu Jan 17, 2008 10:22 pm    Sujet du message: Ange ou démon Répondre en citant

  Le fuseau tomba à terre, déroulant la précieuse laine filée sur la terre battue de l'atelier. Marie semblait possédée, écroulée à-demi sur son tabouret sous l'emprise de tressautements.
  Mais ce qui effraya le plus Margot ce furent ses yeux qui semblaient vouloir tourner vers l'intérieur de sa tête.
   Elle resta un instant subjuguée par l'étrangeté malsaine de la scène mais dans un élan de terreur supérieur à son sentiment précédent elle courut appeler la mère Thérèse qui devait se trouver dans les cuisines du couvent.
   Marie fut rapidement emmenée au lit. La crise était passée et nombre des soeurs se relayèrent pour prier le seigneur de bien vouloir protéger cette pauvre jeune fille des mains du Démon.
   Car comment expliquer qu'une telle horreur puisse être le fait d'autres causes ?
  Par précaution mère Thérèse installa un bénitier au chevet de la possédée pour que chacune fasse ses ablutions immédiatement après l'avoir approchée.
  
   Margot fut renvoyée bien rapidement au travail. Il était nécessaire pour elle de se concentrer sur autre chose que la scène démoniaque dont elle avait été la spectatrice et l'on avait interdit à quiconque de la questionner sur le sujet.
   Mais comment oublier le corps tremblant de son amie, ses yeux si effrayants.
  A force d'y penser en manipulant le fuseau, elle trouvait presque fascinante cette image. N'avait-on pas entendu dire que certaines saintes levaient les yeux aux ciel, leur pupille presque absentes quand elles entendaient la voix du seigneur?
   Peut-être que l'on se trompait sur l'origine de la crise de Marie, peut-être que cela n'avait rien à voir avec le démon et que l'on commettait un blasphème en imaginant une telle chose.
   Une longue journée de travail qui ne mobilise que les bras permet souvent à la tête de travailler de son coté et, toute déterminée, Margot se rendit au chevet de son amie avant le coucher.
  Elle ressemblait bien plus à une sainte dans ces draps blancs, ses courtes mèches, signe de renonciation en bataille, sur son visage serein de dormeuse.
  
   Elle se sentait presque envieuse d'imaginer l'expérience mystique présumée de son amie et avait l'impression que chaque ablution faite à son chevet était une insulte à ce qu'elle venait de vivre.
   Emportée par sa naïveté et la spontanéité de sa jeunesse, elle sortit de la chambre et se rendit à la chapelle, demandant à être entendue dans le confessionnal par le prêtre.
  Il fallut bien une demi-heure avant qu'elle ne vît arriver le père Roger, cintré de noir et le sourire canaille d'avoir laissé derrière la porte soeur Marguerite. Cette dernière n'allait sûrement pas restée longtemps parmi elles quand elle aurait le gros ventre que mère Thérèse qualifiait de maladie congénitale. D'après cette dernière c'était le rôle du père Roger de tester la dévotion de chacune d'entre elle. Margot n'avait jamais été testée et elle s'en félicitait ; le père devait lui accorder déjà toute sa confiance.
  
  Une fois les deux portes en bois ciselées fermées, Margot sentit sa confiance revenir.
   « Mon père, je crois que Marie n'est pas sous l'emprise du démon. Je crois qu'elle a eu une vision du seigneur. Il n'y a aucune raison pour que Satan s'attaque à elle, elle est si belle, c'est forcément qu'elle appartient déjà aux créatures de Dieu. »
  
   Le père Roger faillit s'esclaffer mais se retint à temps.
   « Ma fille, ce sont les plus belles des femmes qui attirent la convoitise du démon. Tu as la chance de ne pas l'être toi-même ; ainsi tu restes à jamais à l'abri de ses maléfices. Marie a été possédée et sa famille devra rapidement la récupérer. Elle ne peut rester en ce lieu saint. Pries donc pour son âme au lieu de lui trouver des excuses charmantes mais fausses. »
  
  Margot avait beau avoir conscience qu'elle n'était pas une beauté, elle fut tout de même blessée par la remarque, et elle était d'autant plus outrée de voir que le couvent qui croyait son amie presque damnée ne cherchait pas à lui venir en aide mais à la mettre dehors dans la monde réel ou le mal avait un pouvoir bien plus grand.
  A bien y réfléchir, le mal semblait avoir ses entrées ici même puisque l'on jugeait sans preuve son amie, puisqu'on lui refusait toute absolution et puisque même en ce lieu saint on ne pouvait imaginer la possibilité d'un miracle.
  Alors en un éclair Margot su ce qu'elle avait à faire. Elle remercia le père Roger et s'en alla trouver la mère Thérèse, se plaignant de nausées matinales et de ne plus avoir de pertes impures.
  Marie repartie dans sa famille la semaine suivante et décéda deux ans plus tard d'une crise d'épilepsie tandis que Margot retourna dans sa ferme aider sa mère devenue proche de l'impotence et si elle eut le gros ventre ce fut cinq ans plus tard dans le lit de son époux.
  Dans le village on raconte qu'elle n'était pas très jolie dans sa jeunesse mais que le couvent lui a fait le plus grand bien. On dit aussi qu'elle a appris à soigner avec certaines plantes et qu'elle aide les femmes dans le besoin sans en dire mot au curé. Cela pourrait lui porter préjudice mais les femmes, quand cela leur sert, savent bien garder certains secrets.
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